Au sein d’un service de prévention et de santé au travail (SPST) en France, il arrive fréquemment que les médecins du travail aient besoin de se transmettre le dossier médical d’un salarié. Mais quelles sont les règles qui encadrent cette pratique ? Le consentement explicite du salarié est-il toujours requis ? Dans cet article, nous vous apportons des éclaircissements sur ce sujet important, en nous appuyant sur les dispositions légales et réglementaires en vigueur, ainsi que sur les recommandations du guide pratique publié par la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) [1].
Tout d’abord, il est important de souligner que la transmission du dossier médical entre médecins du travail est possible en interne, c’est-à-dire au sein d’un même SPST. Cette transmission doit s’inscrire dans le cadre de la continuité du suivi médical du salarié et être justifiée par des raisons médicales liées à sa santé et à sa sécurité dans son environnement professionnel [1], conformément aux missions des services de santé au travail définies à l’article L. 4622-2 du Code du travail [2].
Cependant, contrairement à ce que l’on pourrait penser, le consentement explicite du salarié n’est pas toujours nécessaire pour procéder à cette transmission interne. En effet, le guide de la CNIL précise que le salarié doit être informé de cette transmission, mais son accord formel n’est pas obligatoire [1]. Cette disposition est conforme à l’article L. 1110-4 du Code de la santé publique, qui autorise le partage d’informations médicales entre professionnels de santé participant à la prise en charge d’un patient, sauf opposition de ce dernier [3]. Toutefois, le salarié conserve le droit d’accéder à son dossier médical, tel que prévu à l’article L. 1111-7 du Code de la santé publique [4], et peut s’opposer à cette transmission pour des raisons légitimes [1].
Il est essentiel de noter que les informations transmises doivent se limiter strictement aux éléments nécessaires pour assurer la continuité du suivi médical et protéger la santé du salarié [1], conformément au principe de minimisation des données énoncé à l’article 5 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) [5]. Les médecins du travail sont tenus au secret médical, en vertu de l’article L. 1110-4 du Code de la santé publique [3] et de l’article 4 du Code de déontologie médicale [6], et doivent veiller scrupuleusement à la confidentialité des données partagées [1].
Par ailleurs, le guide de la CNIL souligne que cette possibilité de transmission interne ne s’applique qu’aux médecins du travail exerçant au sein du même SPST [1]. Dès lors qu’il s’agit de transmettre le dossier médical à des tiers extérieurs au service, le consentement explicite du salarié devient généralement obligatoire, sauf dans certains cas exceptionnels prévus par la loi, comme une situation d’urgence médicale par exemple [1].
La transmission du dossier médical entre médecins du travail au sein d’un même SPST est possible sans le consentement explicite du salarié, sous réserve de respecter certaines conditions. Le salarié doit en être informé, les données transmises doivent être limitées au strict nécessaire, et la confidentialité doit être garantie [1]. Cette souplesse vise à faciliter la continuité du suivi médical, dans l’intérêt de la santé et de la sécurité des salariés. Cependant, dès qu’il s’agit de communiquer le dossier à l’extérieur du SPST, le consentement du salarié redevient la règle, sauf exceptions légales [1]. Les médecins du travail doivent donc être vigilants et rigoureux dans la gestion de ces transmissions, afin de concilier au mieux le suivi médical des salariés et le respect de leurs droits.
Références : [1] CNIL. (2022). Guide pratique SPST – Services de prévention et de santé au travail. Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés. https://www.cnil.fr/sites/default/files/atoms/files/cnil_guide_spst_0-2.pdf [2] Article L. 4622-2 du Code du travail. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000033019625/ [3] Article L. 1110-4 du Code de la santé publique. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041721858/ [4] Article L. 1111-7 du Code de la santé publique. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000041721490/ [5] Article 5 du Règlement général sur la protection des données (RGPD). https://www.cnil.fr/fr/reglement-europeen-protection-donnees/chapitre2#Article5 [6] Article 4 du Code de déontologie médicale. https://www.conseil-national.medecin.fr/code-deontologie/devoirs-generaux-medecins-art-2-31/secret-professionnel-art-4