Le 15 octobre 2025, la CNIL a publié son 10ème Cahier Innovation et Prospective (IP), intitulé « Nos données après nous », fruit du travail de son Laboratoire d’innovation numérique (LINC). Ce document interroge un sujet rarement débattu mais pourtant essentiel : le destin de nos traces numériques après notre décès.
Des traces numériques qui perdurent
Profils en ligne, photos, messages, historiques d’activités : la mort n’efface pas nos empreintes digitales. Sans action des proches ou directives laissées de notre vivant, ces données continuent d’exister, parfois indéfiniment. Cette persistance soulève des questions juridiques, éthiques et sociales majeures. Le RGPD ne s’appliquant pas aux personnes décédées, ce sont d’autres cadres juridiques – nationaux ou successoraux – qui encadrent leur devenir.
Une enquête et des récits pour nourrir le débat
Le Cahier s’appuie sur :
-
une enquête Harris Interactive – CNIL, révélant la perception des Français vis-à-vis de leurs données post mortem ;
-
une analyse de design conduite par le LINC ;
-
quatre récits fictionnels élaborés avec l’agence Mon Oncle.
Ces approches croisées permettent d’explorer les dimensions multiples de la « mort numérique » : mémoire, héritage, transcendance, matérialité. Elles montrent aussi combien ces traces deviennent objets de deuil, de mémoire collective, mais également de nouveaux usages comme la création d’agents conversationnels (« deadbots ») simulant la parole de défunt.
Des enjeux juridiques et éthiques
Le Cahier IP n°10 rappelle que la loi française (loi pour une République numérique de 2016) permet à chacun de donner des directives sur le sort de ses données après sa mort. Pourtant, ce droit reste largement méconnu. Il s’agit pourtant d’un enjeu crucial : faut-il protéger la mémoire du défunt, les droits de ses héritiers, ou l’intérêt collectif à conserver certaines archives ?
La CNIL insiste également sur la nécessité d’encadrer les usages de l’intelligence artificielle appliquée aux données post mortem. La perspective de recréer une voix ou une présence numérique d’un disparu interpelle autant qu’elle inquiète.
Des pistes pour l’avenir
Le rapport formule plusieurs recommandations :
-
sensibiliser le public à la possibilité de définir ses volontés numériques,
-
clarifier les droits des héritiers et des proches,
-
prévenir les dérives liées à l’usage de l’IA appliquée aux données de défunts.
En publiant ce Cahier, la CNIL invite à un débat de société qui dépasse la seule technique. Penser le futur de nos données, c’est aussi repenser notre rapport à la mémoire, au deuil et à l’identité dans un monde numérique qui ne connaît pas de fin.
































