Dans une décision récente (Pourvoi n° 21-18.558), la Cour de cassation a apporté des précisions importantes sur l’application du Règlement général sur la protection des données (RGPD) dans le contexte des visites domiciliaires et des saisies effectuées par l’administration fiscale. Cette décision, rendue le 1er juin 2023, est particulièrement significative car elle définit les limites des exceptions au RGPD dans le cadre des enquêtes visant à lutter contre la fraude fiscale.
L’affaire concernait la société FHF International, qui avait contesté l’autorisation accordée à l’administration fiscale de procéder à des opérations de visite et de saisie dans divers locaux. La société soutenait que le traitement des données à caractère personnel effectué par l’administration fiscale pour obtenir cette autorisation n’était pas conforme au RGPD.
La Cour de cassation a statué que le traitement de ces données par l’administration fiscale pour obtenir l’autorisation de procéder à des opérations de visite et de saisie entre dans le champ d’application matériel du RGPD. Cela signifie que l’administration fiscale est soumise aux obligations du RGPD lorsqu’elle traite des données à caractère personnel dans ce contexte.
La Cour a également précisé que le juge doit vérifier si l’administration fiscale, en tant que responsable du traitement, est tenue de fournir à la personne concernée les informations prévues à l’article 14 du RGPD. Cet article impose au responsable du traitement de fournir à la personne concernée un certain nombre d’informations lorsque les données à caractère personnel n’ont pas été collectées auprès d’elle. Cependant, le paragraphe 5 de cet article prévoit une exception à cette obligation lorsque celle-ci est susceptible de rendre impossible ou de compromettre gravement la réalisation des objectifs du traitement.
En outre, la Cour a souligné que l’article 23 du RGPD permet aux États membres de limiter la portée de l’obligation d’informer la personne concernée par le traitement de données à caractère personnel lorsqu’une telle limitation respecte l’essence des libertés et droits fondamentaux et constitue une mesure nécessaire et proportionnée dans une société démocratique pour garantir la prévention et la détection d’infractions pénales, les enquêtes et les poursuites en la matière et d’autres objectifs importants d’intérêt public général d’un État membre, notamment un intérêt économique ou financier important, y compris dans les domaines monétaire, budgétaire et fiscal.
En conséquence, la Cour de cassation a cassé et annulé l’ordonnance rendue par le premier président de la cour d’appel de Paris, et a renvoyé l’affaire devant la juridiction du premier président de la cour d’appel de Paris autrement composée. Cette décision pourrait avoir des implications importantes pour la manière dont l’administration fiscale et d’autres autorités traitent les données à caractère personnel dans le cadre de leurs enquêtes.